Ta réminiscence


 



            Le vide.

Une pièce ronde qui t’habitait est maintenant sortie hors de toi. Dorénavant, elle t’entoure.  

Tu ne saurais dire depuis quand cela dure. Depuis quand ta main glisse sur la paroi ondulée de cette yourte? Depuis quand tes doigts, ton bras et ton épaule se soulèvent au rythme de l’ondoiement et se laissent aussitôt redescendre afin de recommencer le mouvement? Une marche arrondie dans le sens inverse de l’horloge. Piégée, tes pieds grugent le sol terreux, font monter l’odeur d’humidité, l’odeur de soufre. Tu ne parles plus. Jamais plus que pour ta propre évasion.

Au rythme de tes pas et de ta main droite qui traîne sur le bois, tu apprivoises cette nouvelle vie faite d’incompréhension et de solitude. Il ne te blesse plus de vivre que de poussières. Il ne te blesse plus d’avoir atteint l’oubli absolu. Tu existes pour ce sol et cet habitacle circulaire. Une robe, une toison et des pensées infertiles en boucle. Le souffle comme seul guide.

Une natation inconsciente, tu ne fais que piétiner, chaque appui renferme ton existence dans ce cercle incalculable. La réminiscence s’est métamorphosée en évidence. Pendant que tu vis cet instant, les appuis de ta main et de tes pieds au sol établissent un délicat décalage entre la lumière et la noirceur. Tu demeures dans ce lieu de convalescence, un crépuscule de cendres, ton égarement. Tu vis courbé pour ne pas ressentir le vide des vies pleines. Au centre de la pièce, un faisceau de rayons pétillants se grave sur le sol. Tu marches là où la nitescence ne peut te pyrograver. Un déplacement céleste qui t’oblige, qui te rapproche de ton mitan, de ta solitude écliptique.

Tu cherches une idée, mais plus tu la fouilles, plus tu crois l’avoir rêvée. Tu traverses tous les cahiers de vent. Elle te fuit à nouveau, l’idée s’éloigne de toi et te reviendra sans doute en retard. Trop tard pour faire partie des mots qui se creusent un nid entre ton amnésie et ton état d’esprit. 



Commentaires

  1. « cahiers de vent », wow! Cette image me transporte! Tes textes ont une couleur unique, merci Mélissa!

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