Lettre à Dawit Isaak

 


« Si tu as la possibilité d’écrire, fais-le » : une devise, une idée que tu as toujours défendue. Si je devais te définir par un seul mot, ce serait le courage. Tu es né et tu as grandi en Érythrée, pays classé grand dernier en ce qui concerne la liberté d’expression. Pays connu comme étant une prison géante de journalistes. Et pourtant, tu as décidé d’y fonder un journal et d’y exprimer tes opinions. Tu avais déménagé en Suède et y avait obtenu la citoyenneté. Tu avais une famille. Tu aurais pu rester dans ces terres d’adoption, dans ton confort et sécurité. Mais tu ne l’as pas fait. Tu avais toujours ton pays natal dans le cœur, et ce qui s’y passait te révoltait. Au lieu de prendre les armes pour te battre, tu as choisi les mots. De simples écritures noires sur papier blanc, qui t’ont mené en prison. Mais tu sais, ton combat n’est pas vain. Une nation entière se bat pour toi.

Quel est donc ce monde où l’on ne peut exprimer librement ce qu’on pense sans avoir le cœur qui cogne bruyamment dans la poitrine, où de simples mots sortis d’une plume vous procurent une angoisse permanente du son des bottes derrière la porte, des mains puissantes qui viennent vous empoigner pour vous jeter en cage?

J’ai de la difficulté à imaginer un tel monde, moi qui vit dans le petit confort de mon Occident, moi qui ai le droit et la possibilité de sortir dans la rue et de hurler mon mécontentement et ma colère. Moi qui peux écrire tout ce que je veux, sans jamais avoir peur de me faire enfermer.

Ton histoire me révolte, me met hors de moi. Mais tu n’es pas seul. Des tas de personnes sont avec toi et mènent une lutte acharnée pour ta libération, pour qu’un jour tu revoies la lumière du soleil, pour que tu puisses serrer tes proches dans tes bras, pour que tu écrives à nouveau. Ton nom n’a pas été oublié, ni ton histoire. Accroche-toi à tes mots, sois fier de ta plume et crache sur l’injustice qui est tombée sur toi. J’ai espoir qu’un jour tu pourras à nouveau te faire entendre haut et fort.

 

Isaline

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