Saitama - Vík í Mýrdal

 









Saitama

 

Une fois arrivé à Tokyo j’eus une recrudescence de vitalité incroyable – tout mon manque de sommeil est resté dans les nuages que l’avion venait tout juste de traversé. C’est quand j’ai vu, par mon petit hublot, l’immensité de la ville, que j’ai eu la sensation que Québec n’était qu’en fait un mignon petit village adorable.

 

Je me cherche un peu dans l’aéroport pour trouver la gare de train. Je trouve un point d’information touristique visuellement immaculé : il n’y a pas un seul magazine sous l’éclairage tamisé de la boutique qui, sur leurs présentoirs en faux bois, apparait décalé de quelques centimètres de sa position voulue. Pas un seul emplacement libre où l’on pourrait voir la fibre de ce bois ; à se demander si c’est parce qu’il n’y a personne qui les achète, ou bien si la jeune fille derrière le comptoir passe comme une fée aussitôt que l’un d’eux est acheté.

— Hi

Justement, la jeune fille d’apparence japonaise m’invite à la questionner sur le cosmos qu’est Tokyo. Son petit chapeau, sa posture bien droite et son bel habit soigné me font lever les joues.

D’un anglais impeccable, elle me demande comment elle peut m’aider. Je lui explique que je souhaite me rendre à Saitama en train. Avec aisance et rapidité, elle ouvre quelques dépliants et dessine une carte au trésor sous mes yeux. Je la remercie :

 Arigatô gozaimasu

 

Je passe devant des stands de ramen à me faire saliver, mais on m’a promis le meilleur des repas ce soir à mon arrivée, alors je ferme les yeux.

J’entre dans le monorail, je place en haut, dans le compartiment, mon sac à dos. Je garde avec moi mon téléphone, je m’assois, regarde par la fenêtre et mets mes écouteurs. Le train part.

Doucement, au son de la musique, la métropole devient une autre ville et les gratte-ciel rétrécissent. Je me connecte au wifi du train, puis je reçois un texto de Aiko : on t’attend tous avec impatience à la gare de Saitama :).



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Vík í Mýrdal

 

 Ton accent, il est si beau. D’où viens-tu ?

 Je suis mi-islandaise, mi-française.

Elle aurait pu ajouter mi-ange (j’aurais hoché la tête)... elle était trop humble. Vous savez ces yeux sans nuages ? Elle les avait. Et ce calme alcyonien (si rare) qui se dépose dans certaines âmes. Elle l’avait également. Cette belle aura lui donnait un air d’une grande maturité. Je soupçonnai ses parents d’être de belles personnes. Mais ce n’était que la moitié des choses. L’autre moitié résidait forcément dans le lieu où l’on se trouvait, celui qu’elle habitait : Vík í Mýrdal. Cette petite localité islandaise protégée de montagnes — presque intouchée de l’homme —, mais ouverte sur une mer où déferlaient les accents de l’accalmie sur un sable noir et scintillant.

François et moi venons d’entrer dans la petite maison blanche au toit bleu. Un des bâtiments le plus reculé du village et notre auberge pour la nuit. Le mi-ange nous fait signe d’approcher de son petit cubicule en bois tout épinglé de centaines de notes et de cartes postales. Après notre bref échange, elle nous donne les clés et nous montre notre chambre au dernier étage : plafond bas, croche-grenier et tout étroite ; juste parfaite. On installe nos affaires. Échangeons sur l’odeur merveilleuse qu’on venait de sentir en passant près des cuisines. On redescend. Plusieurs jeunes assez âgés (un groupe scolaire) étaient en train d’avoir une conversation de vaisselle — ou philosophique, qui sait ? Je ne comprenais pas ces phrases — en danois. Mais nous voyant préparer notre souper, ils nous invitèrent (en anglais [et l’on échangea sur nos origines]) à manger les restants de l’ambroisie qu’ils avaient cuisinée plus tôt. Saumon pêché ce matin même d’un lieu de culture en Islande ; légumes biologiques récoltés dans un jardin de Vík í Mýrdal.

Au ciel.

Dire que nous allions manger (la même chose que les derniers jours) des pâtes noyées dans une sauce sans saveur avec quelques morceaux de thon en canne.





 


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