Une brise soulève ses cheveux, exceptionnellement, lousses ; elle s’est permis ce matin de prendre du temps pour les coiffer. Elle les replace d’une main tremblante et caresse inconsciemment son ventre qui commence à peine à s’arrondir. En franchissant les portes coulissantes de la gare, un sourire se glisse sur ses lèvres. D’un style d’architecture plus ancien qu’un aéroport, les poutres et les vitraux de la gare ont toujours su faire vibrer quelque chose à l’intérieur d’elle.
Son dernier voyage avant l’arrivée de son deuxième
enfant. Ses premières vacances toute seule depuis longtemps. Sa sœur avait ri
d’elle, ne pensait pas que c’était vraiment un voyage : partir quelques
jours, mais en restant dans le même pays. Mais pour Ilina, c’est ce qui s’en
rapproche le plus. À peine quelques mois après avoir accouché de son premier
enfant, elle a appris qu’elle était de nouveau enceinte. Joies, doutes et peurs
se sont succédé dans un tourbillon encombrant. Elle espère que ces quelques
jours sans les tracas quotidiens vont lui permettre de mettre de l’ordre dans
sa tête et ses émotions.
Son conjoint n’a pas été très enthousiaste à l’idée de son projet de voyage. Après maintes argumentations et plaidoyers, elle a eu gain de cause. Avant de partir, elle s’est assurée de lui laisser une liste détaillée des tâches à faire dans la maison et une autre pour tout ce qui concerne le bébé. Elle soupire déjà à l’idée du gros ménage qui l’attend quand elle va revenir.
Secouant la tête pour chasser ces pensées, elle se dirige vers le quai d’embarcation. Elle s’étonne du nombre de voyageurs présents pour un train si tôt le matin. Plusieurs d’entre eux regardent dans le vide, encore les deux yeux dans le même trou et prennent, d’un rythme régulier, des gorgées de leur café. Cette boisson lui manque.
À l’arrivée du train, elle s’empresse de trouver un bon siège proche d’une fenêtre. Elle ne souffre pas habituellement du mal des transports, mais étant enceinte, elle ne prend pas de risque. Au fil des kilomètres parcourus, champs, forêts et villages s’alternent dans une arabesque de couleurs variant du gris au vert en passant par le jaune. L’esprit d’Ilina se vide ; sa poitrine se soulève et s’affaisse avec une légèreté oubliée. Elle lui semble même sentir un mouvement dans son ventre, même si elle sait que c’est encore trop tôt pour ça.
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