LA MAISON DES PÊCHEURS - BUVONS ENSEMBLE

         


LA MAISON DES PÊCHEURS

        Après avoir tourné la dernière page du livre, « La cathédrale de la mer » d’Ildefonso Flacones, j’ai su qu’un jour j’irais à la rencontre de ce lieu culte. 

        Basílica Santa Maria del Mar. 

     Cette église a été érigée par les débardeurs du port de la Ribera. À la sueur de leurs efforts, ils transportèrent des blocs de pierre, un à un, soit de la carrière de Montjuïc ou de la plage où les bateaux déchargeaient ces monstres de roc. Un lieu sacré bâti par et pour les pêcheurs. Un symbole témoignant de leur humilité et de leur foi. 

    En 2016, je réalisais mon rêve. J’atterrissais en Espagne. Barcelone m’a envoûtée. Je ressentais la vibration d’un peuple. Celui-là même qui m’avait interpellé à travers 600 pages de lecture. Mon imagination prenait racine. Je m’amalgamais doucement aux Catalans. Mes retrouvailles avec l’emblématique église étaient sur le point de se produire. 

     Deux jours sont passés avant que je ne m’aventure vers toi. Je te contournais, tu me paraissais tellement inaccessible par ta grandeur. Je me promenais sur les ramblas lorsque tes cloches ont résonné sur ma gauche. Tu me faisais signe. 

    Je me suis laissé prendre à ton jeu et j’ai posé le pied dans ta demeure. Tu m’as engloutie dans ta pénombre enveloppante. Tu m’as secouée par une telle beauté. Tu m’as inondée par la puissance de ton sacré. Je me suis placée dans un banc sous ta voûte. Face au transept, je ne pouvais que rendre gloire à ce peuple qui t’a érigée il y a de cela 700 ans. Je vénérais ses mains habiles. Ta splendeur me renversait. 

     Et soudain, mes larmes se sont mises à couler. En quelques instants, tu m’as permis de renouer avec mes êtres chers partis dans l’au-delà. Tu as remué la foi qui s’était endormie bien loin en moi. Tu m’as fait comprendre le vrai sens du mot croire. Doucement, je marchais avec ces pêcheurs à construire mon Église. J’étais secouée. Et c’est là que j’ai compris, notre rencontre n’avait rien de fortuit. 




BUVONS ENSEMBLE



       À Londres, Buckingham Palace est à visiter. La Tour de Londres aussi. Pour les moins peureux, le parcours de Jack l’Éventreur se veut un exploit. Pour les plus aristocratiques, prendre le thé au Royal High Tea au Palais de Kensington doit s’inscrire dans les incontournables. Mais moi, j’y vais pour un verre de vin chez Gordon’s Wine Bar. 

       Un petit bijou à découvrir. Situé entre Embankment et Charing Cross sur Villiers Street. Ce bar se cache au fond d’une impasse. Il se cloisonne derrière une petite porte qui ne paye pas de mine. Pour ceux qui la trouvent et la franchissent, il faut descendre un escalier pour arriver dans une cave voûtée en vieilles pierres suintantes. 

       L’antre des plaisirs. 

       Malgré la pénombre de l’établissement, notre regard se porte tout au fond sur des bouteilles de vin emmurées derrière une grille moyenâgeuse. On se demande depuis combien de siècles ce trésor dort au creux de cette enceinte. Toute l’ambiance est là. Sur de petites tables, des bougies scintillent jusqu’à leur épuisement. Lorsque la cire est fondue et que la mèche n’éclaire plus, les serveurs s’empressent de remplacer l’antique objet par un autre en le faisant tenir dans l’empreinte du lumignon précédent. La magie est sans cesse renouvelée. 

      La carte des vins ne concurrence pas celle du Cricova. Cependant, il y en a pour tous les budgets. Ici, on boit pour le plaisir, grand ou petit. Entre collègues et amis. Certains touristes s’immiscent en intrus et se fondent dans la masse, le lieu est roi. On partage un verre et une plaquette de succulents fromages venus des quatre coins du continent. On s’y installe pour une heure ou deux et finalement pris au piège, la soirée se termine au petit matin.     

      Tant qu’à moi, c’est à cette heure que je commence à m’entretenir avec Elizabeth. Encadrée sur le mur à mes côtés, couronné et vêtu des atours de son intronisation, elle ne m’impressionne plus. Elle et moi, nous faisons la fête.



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