JE SUIS UNE SORCIÈRE COMME LES AUTRES
mes grands-mères rêves aux nattes défaites
parfum ocre
fleurs sauvages
champs de blé
mes mères lunes aux mèches noires
dents étoiles
vagues
tempêtes
mes filles boucles rousses
grenat grossulaire
plaines vertes
montagnes claires
mes femmes mes sœurs mes amies
toutes parties de moi réunies
la jeune l’actuelle la vieille
mes lunes mes nécromanciennes aux touches de miel
je suis une sorcière comme les autres
fidèle et furieuse magicienne
teint pâle
cheveux gris
nez large
rire cri
stéréotype enfourné en gorge profonde étouffée
je suis une sorcière comme les autres
pleine jeune morveuse
pleine vieille piteuse
mais pas pleine honteuse
mes grand-mères cauchemardent
mes mères noyades
mes filles incendies
mes femmes mes sœurs mes amies
toutes parties de moi ensevelies
je suis une sorcière comme les autres
tisane camomille
détente de lavande
sauge brûle
vite purifie
tout
pour boucher vos oreilles
car nul ne veut entendre
mon agonie
MARIÉE POINT DE FUITE
j’t’attends
robe toile blanche page vierge talons hauts jarretelles
prête pour aquarelle gouache avec les mains spray paint bordel
chaos vulgaire touches explosives
allumeuse en veilleuse
j’t’attends
viens m’scrapper en deux me torde me verser m’incendier
au bout d’l’allée
j’t’attends
pour me sauver
loin d’eux
mon peintre de ruelles
habitué à colorier les vides comme moi
t’attends quoi?
PIEDS NUS DANS L'ÉPINETTE
Je grimpe
Sur une roche géante
Pieds nus
La tête dans le vent
Les orteils
Dans la gomme d'épinette
J'vais la mâcher
Pis en faire des ballounes
Si grosses qu'elles pourront
Peut-être
M'emmener
ART NON DURABLE
On construit des murailles, pour cacher nos constructions. On peint dessus, on en fait des murales artistiques, des œuvres temporaires pour cacher les imperfections. On ne veut pas laisser le monde voir derrière, on ne veut pas laisser le monde voir les vraies affaires. Peintures en illusions, on se gouache d’éphémère. Pis on démonte l’art, on en a pu besoin. On retire la couleur, on montre nos nouvelles édifications. Un building, gris, laid, impersonnel se tient maintenant là à la place.
GROS MATOU
- Regarde comme j’suis mignon.
- T'as l'air d'un gros matou.
- Mais les matous faut les flatter, sinon y grossissent.
- J’pense pas.
- Aussi, les matous, des fois, y sont malins.
- C’est une menace?
- (Grognement).
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