Exploratrice
en herbe
Je
sors par l’entrée avant de l’immeuble où je loge, écouteurs bien enfoncés dans
mes oreilles. Je rajuste mon écharpe avant de monter la côte et de tourner à
gauche. Je sais qu’il y a des graffitis près de mon travail; logiquement je me
rends là-bas pour commencer ma balade.
Je
remonte la rue jusqu’à l’intersection, attend sagement mon tour pour traverser
avant de m’arrêter en plein milieu du trottoir. Vu ma mémoire défaillante,
prendre des photos me semble une bonne idée. J’effectue un premier cliché. Une
voiture s’arrête et me laisse faire une deuxième photo. Je remercie le
conducteur d’un sourire avant de me remettre en route. Ce petit geste de rien
du tout me fait plaisir.
À
partir de là, je ne sais pas où aller. Je viens de passer devant la pharmacie
où je travaille certains soirs mais maintenant c’est l’inconnu. Où aller? Je
choisis de me perdre volontairement dans des petites rues, de laisser les
couleurs automnales et les décorations d’Halloween précoces me guider, de
flâner comme le font les personnes âgées autour de moi.
Un
coup à droite, un coup à gauche. Je navigue et découvre de nouveaux coins du
quartier où j’habite depuis trois ans. La plupart des graffitis que je croise
sont sur des poteaux. Je les immortalise avec mon téléphone. Je fredonne les
musiques qui défilent dans mes écouteurs. Je photographie également la beauté
de la nature en ce vendredi ensoleillé d’octobre.
Je
cherche à comprendre le sens de certains de ces tags. Les lettres ne
sont pas peintes mais tracées au marqueur blanc. Les traits sont fins,
l’écriture est cursive mais je n’arrive pas à déchiffrer ce qui est écrit. On
dirait un langage codé que seuls les amateurs de cet art réussissent à
comprendre. Je ne dois pas faire partie de ces élus.
Après
m’être réellement égarée, je débouche dans un coin que je connais un peu plus.
Je détourne le regard lorsque je passe près d’un écureuil écrasé, je caresse un
chat errant qui ronronne au contact de ma main fraiche sur sa fourrure, je hume
l’air frais tout en scrutant chaque mur pour y dénicher un dernier graffiti.
Je
descends une petite côte et trouve enfin le tag qui me manquait. C’est
un bonhomme qui a l’air triste; ses yeux sont petits, les sourcils sont froncés
et il a un nez proéminent. Les contours de son visage son absent. Il a été
peint avec une bombe noire. Sa bouche est absente et pourtant je perçois sa
mélancolie, sa nostalgie, sa peine. Moi aussi, je ressens la même chose.
Je
rebrousse chemin jusque chez moi, mains dans les poches. De gros
cumulus gris couvrent le ciel. Il va peut-être
pleuvoir.
Someday I like
it, another day not so much
But even if I
can’t do it
I’m sure all the
days we’ve piled up
Will push
us forwards.[1]
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