Le coffre de cèdre

         




            Comment ai-je pu échouer à ce point...? Auparavant j’étais gardien. Gardien d’un sentiment puissant et doux. Gardien de leurs vœux. Jamais je n’aurais pu imaginer tomber si bas… Je repose désormais sur un sol froid, humide, je ne vois que très rarement cette agréable lumière qui, auparavant, brillait dans leurs yeux, et j’étouffe sous tous ces décombres… Est-ce le repos que je mérite? J’ai si longtemps défendu leur espoir. Je l’ai porté avec chaque déménagement. J’ai traversé les générations sans jamais abîmer mon contenu. Et c’est tout ce que je reçois… On m’a coupé de mon ancienne vie, et déraciné de mes origines. Je suis passé d’un symbole de pérennité à un symbole d’amour. Tout ça, pour échouer… Tout ça pour les voir dans une évolution rétrograde, pour les voir effectuer un pas vers l’avant puis trois vers l’arrière… 

J’ai été fabriqué comme symbole de leur amour. Je me devais de protéger tout ce qui le constituait. C’est ce que j’ai fait pourtant… Rien n’a pu élire domicile dans le délicat voile de sa robe et aucun champignon n’a pu corrompre les lettres d’amour qu’il lui a écrites… Avec le temps, les mariés m’ont confié leurs plus grands trésors, rien n’a été altéré. J’ai dignement trôné aux pieds de leur lit, récupérant à mesure chacun de leurs nouveaux trésors. Mais aujourd’hui, leur amour est fatigué, leur joie endormie et leurs trésors vidés de tout sentiment…

J’ai enfin pu sortir des décombres. Cela faisait longtemps que je n’avais pas vu l’extérieur. Le temps est doux. Hier, on m’a vidé de mon contenu. Aujourd’hui j’ai été déposé ici. Il y a quelqu’un près de moi. Il est grand et noir, il m’a l’air noble. Je me demande ce qu’il protège.




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