Histoire de grimpe

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 Délire Escalade Pierre-Bertrand, septembre 2020


Je suis debout, plaquée contre le mur, en équilibre. Mon poids repose uniquement sur mon pied droit. Ce pied droit est appuyé sur un bloc bleu de forme triangulaire, à un mètre du sol. Je reste complètement immobile. Mon centre de gravité doit tranquillement basculer vers mon pied gauche, dont le gros orteil est posé sur une prise minuscule. Je me concentre tellement que je respire à peine. On dirait qu’un fil tire mon nombril vers mon talon. Il ne faut pas. Bouger. Mes muscles tremblent sous ma chair statique. Je serre les dents. Les bras tendus, je forme une croix. Mes poignets se frottent contre le mur gris. Je cherche du bout des doigts une cavité dans la paroi. Je glisse. Mes yeux paniquent, ne regardent plus nulle part, je ne respire pas, le temps est suspendu. Les bruits deviennent sourds, comme dans un bocal, comme sous l’eau. Je lève les yeux avec une extrême lenteur, de peur que le simple mouvement de mes cils me fasse basculer. Ça sent la magnésie moite. J’aperçois la prise bleue, tellement loin de mes mains, de mes pieds, de moi. Je ne vois plus qu’elle. Rien d’autre n’existe, sauf l’importance de rester le plus lent et le plus immobile possible. Même le mur retient son souffle. Ma main droite monte tranquillement au-dessus de ma tête, ma paume s’écorche. Je dois sauter. Tout. Doucement.

 

 

Ça ne dure qu’un instant mais je vous promets que je vole.

 

 

Le temps recommence. La musique revient, mes amis crient, mon orteil a tenu, mes mains sont solides, et je me balance dans le vide, à trois mètres du sol. Mon cœur reprend les battements qu’il avait manqués, puis je me laisse tomber. 

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