Le corps se détend peu à peu, l’obscurité absorbe l’esprit, mais l’acouphène pulsatile demeure. Résonne dans les écouteurs. C’est le cœur qui bat sourdement, sous l’oreille droite, martelant son inlassable rythme vital, attirant la conscience vers l’étincelle initiale.
Je me dissous en fœtus, enveloppée dans ma douillette comme dans une eau amniotique. Je veux sortir du ventre. Je force mon souffle pour qu’il déborde de la frontière de la peau. Mais je reste coincée à l’intérieur. Lovée dans la noirceur du silence tiède, j’attends. Je me dérobe à la panique.
Des lumières fugaces surgissent. Des rushs d’images clignotent. Projetés sous la paupière, en dégradés de verts et de jaunes. D’où émanent ces fragments de réel ? Sont-ils issus de la mémoire de la mère porteuse ? De la femme qui arrive des bois ?
L’embryon presqu’assoupi flaire le souvenir de l’humus d’automne : des traces parfumées de feuilles et de souches en décomposition. Et l’odeur des champignons. La fertilité cyclique de la terre vient inscrire une promesse dans les pas du rêve. Des sons murmurent des échos : les bottes qui impriment un bruit feutré sur le sol à chaque pas. Et de brèves notes aigües pépiant une joie de branche en branche.
La conscience flottante s’imbibe de souvenirs plus anciens, déposés depuis longtemps dans la mémoire de la mère marcheuse. Un poème de Baudelaire fait irruption et entraîne avec lui l’esprit du fœtus qui croise de vivants piliers, traversant une forêt de symboles.
L’âme, naissante ou vieillissante, se sent dans son berceau, en circulant parmi les troncs majestueux de la forêt ancestrale. Lieu porteur d’annales millénaires, de lunes incomptables, d’inlassables transformations sous l’action continue de la vie. L’âme, ici, touche à sa part d’éternité.
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